FORUM SOCIAL EUROPEEN du 13 AU 16 novembre 2003
Liste des séminaires et plénière sur la Palestine auxquels nous avons assisté :
SEMINAIRES
« Pourquoi une force de protection du peuple
palestinien, devant la nouvelle offensive colonialiste israélienne ? »
Organisé par : CCIPPP (FR), AFPSD (FR), LDH (Fr)
Intervenants : Nahla Chahal (CCIPPP), Yasser Akkawi (Alternative Information Center),
Bahia Amra (Pingo), Paul Nicholson (Coordination européenne Via Campesina),
Raji Sourani (Palestinian Committee for Human Rights), Yehudit Harel (ex-Gush Shalom).
« La lutte pour la paix et la justice dans les sociétés civiles israélienne et
palestinienne. »
Organisé par : la LDH (Fr), AFPS (Fr), CCIPPP (Fr), FIDH (Fr), Plateforme des ONG
françaises pour la Palestine (Fr), CEDETIM (Fr), Service civil international (It)
Intervenants : Mustapha Barghouti, (Azmi Bishara), Rana Nashashibi, Jeff Halper,
Khalida Jarrar, (Jessica Montell), Tamir Sorek, Raji Sourani, Peretz Kidron, (Alain Gresh).
Modérateurs : François Della Sudda et Fabienne Messica
« Face à loccupation et aux murs de lannexion, urgence du respect
du droit - la responsabilité de lEurope. »
Organisé par : AFPS (Fr), LDH (Fr), CCIPPP (Fr), Plateforme des ONG françaises pour
la Palestine (Fr), Association belgo-palestinienne (Bel), Action for Peace (It), MPDL (Esp)
Intervenants : Abu Azzam, Ygal Bronner, Henar Corbi, (Jeff Halper), Ruth El Raz,
Allam Jarrar, Alessandra Mecozzi, Abdel Rahman Tamimi.
Modérateurs : Isabelle Avran, Nadia Farkh.
« Campagnes et mouvements de solidarité avec la Palestine en Europe :
rôle, significations et difficultés.»
Organisé par : MIB (Fr), Palestine solidarity campaign (GB), UJFP (Fr),
Collectif des musulmans de France (Fr, Bel, S), Just Peace (GB), CCIPPP (Fr)
Intervenants : Daniel Bensaïd, Youssef Bousmah, Nick Dearden, Tarek Kawtari,
Yamin Makri, Omeyya Seddik, Michèle Sibony, Dominique Vidal, Michel Warschawski.
Plénière :
« Pour les droits nationaux du peuple palestinien, pour une paix juste basée sur
le droit international. Responsabilité de lEurope. »
Organisée par : lAFPS, la CCIPPP, la LDH et la Plateforme des ONG françaises
pour la Palestine, lUJFP.
Intervenants : Fadwa Barghouti (Association de défense de Marwan Barghouti et des
prisonniers palestiniens-Pal.), (Azmi Bishara) (Rassemblement national démocratique-Pal.),
Yehudith Harel (Gush Shalom-Isr.), Dalal Salameh (Conseil législatif palestinien-Pal.),
Michèle Sibony (Plateforme des ONG françaises pour la Palestine UJFP -Fr.),
Tamir Sorek (Yesh Gvul-Isr.), Raji Sourani (Palestinian center for human rights-Pal.),
Michel Warschawski (Alternative information center-Isr.), Peretz Kidron (Yesh Gvul)
Modérateurs : Luisa Morgantini (Femmes en noir-It.) Michel Tubiana (LDH-Fr.).
N.B. Nous avons volontairement laissé les noms de tous les intervenants annoncés et
invités par le FSE. Vous ne retrouverez pas dans la synthèse ci-dessous lexpression
de tous et toutes ; une partie de la délégation palestinienne sest vue refuser
lautorisation de voyager par les autorités israéliennes.
Synthèse des interventions :
Yasser AKKAWI, Palestinien, Alternative Information Center de Jerusalem
Manque de stratégie pour lutter ensemble contre l'Occupation. La plus grande part
du travail est de type réactif. Il faut une stratégie pour la fin de l'Occupation, pas
seulement contre le Mur. Il faut se baser uniquement sur les Droits de Palestiniens.
Si les accords proposés ne les respectent pas, il ne faut même pas les considérer.
Cela ne sert à rein d'écrire des centaines d'articles là-dessus. L'Europe est très importante
car elle donne le sentiment que les Palestiniens ne sont pas seuls.
De quelle force de protection internationale a-t-on besoin ?
La force de protection européenne temporaire à Hébron est une bonne chose, mais insuffisante.
Pas la peine de venir en Palestine pour créer quelque chose de nouveau. Selon le rapport
Ziegler, la Palestine est au bord de la catastrophe humanitaire, au bord de la famine.
Il faut envoyer une véritable force de protection capable de stopper les exactions de
larmée israélienne.
Bahia AMRA, palestinienne, plate-forme des ONG palestiniennes PINGO
Pourquoi faire venir les internationaux en Palestine ? Pour être témoin, être un soutien
dans la lutte. Depuis la deuxième Intifada, des milliers dinternationaux sont venus.
Il faudrait arriver à ce quils aillent directement en Palestine, sans être obligés
de passer par Israël. Leur aide pour lagriculture est très importante.
Fadwa BARGHOUTI, palestinienne, fondatrice de lAssociation de Défense de
Marwan Barghouti et des prisonniers palestiniens. Le sujet des prisonniers est un
problème politique, pas seulement humain. Prétention d'Israël d'être la seule démocratie
au Proche Orient, mais c'est le seul état qui autorise l'utilisation de la Torture par
la Cour Suprême (ce qui n'est pas le cas dans les autres pays. 1600 prisonniers palestiniens
détenus administratifs, sans motif d'arrestation, sur suspicion. Survivance des règles
du Mandat Britannique. Loi considérée comme abusive par les sionistes à l'époque.
Arrestation des mineurs, plus de 450 < 18 ans, garçons et filles à partir de 12ans ;
les ordres militaires qui autorisent leur arrestation. Violation des lois internationales.
Marwan BARGHOUTI est en prison depuis 19 mois, et cela fait des mois que nous navons
plus de nouvelles de lui. Il a été emprisonné bien que nayant commis aucun délit.
Il faisait simplement partie dun mouvement politique important dans la population
palestinienne. Il faut faire pression sur les médias, sur les gouvernements. Campagne pour
libérer Marwan Barghouti.
Mustapha BARGHOUTI, Palestinien, directeur du PARC, Palestinian Agricultural Relief
Committee.
Ce nest pas un conflit entre deux armées, et Israël nest pas la victime.
La situation actuelle est bien plus dangereuse que celle de 1948. La deuxième Intifida
n'est pas une bataille pour une revanche, c'est une bataille pour l'avenir de deux peuples.
Qalqilya, cest Varsovie.
Tout est résistance dans la vie des Palestiniens.
Nous avons besoins de démocratie, et le droit davoir un Parlement élu ;
de légalité des droits pour la souveraineté, la liberté et la dignité de notre peuple.
Nous avons également besoin des missions et de votre présence en Palestine, nous demandons
la solidarité internationale. Venez en Palestine, participez aux actions contre le mur,
faites de cette année lannée de la solidarité avec la Palestine.
Ne vous laissez pas distraire de la réalité du terrain par la Feuille de Route ou les
Accords de Genève. Oui, parce que maintenant, après Madrid, cest Genève. On va
faire toutes les capitales européennes avant darriver à un véritable accord.
Très préoccupé. Il détourne l'attention de la réalité. Cela risque de créer une nouvelle
division dans le mouvement de libération de la Palestine.
Quand nous avons eu connaissance du sondage européen par lequel 59% des européens indiquent
quà leur avis, Israël représente une menace pour la paix dans le monde, nous
navons pas été surpris. Jétais aux Etats-Unis la semaine dernière. Quand on
explique clairement la situation aux Américains, ils réagissent comme vous.
Les Juifs ont certainement beaucoup souffert pendant la 2ème guerre mondiale, mais pas à
cause de nous. Et maintenant, comme lécrivait Edward Saïd, nous sommes devenus les
victimes de la victime.
Le Mur est le développement ultime de l'Occupation : 3500 km de murs et de barrières en
Palestine, alors que la longueur des frontières entre Israël et la Palestine est seulement
de 200 km. Cela représente la distance entre la Suisse et Israël. Ce n'est pas une question
de sécurité. Il sert à créer un système d'apartheid, de ghetto. Il conduit à la destruction
du potentiel palestinien. Il vise à imposer le contrôle d'Israël sur l'ensemble.
Deuxième Intifada, pas seulement les morts et les blessés, 600 000 personnes sont enclavées.
Israël est en train de créer une nouvelle vague de réfugiés. Il faut parler d'épuration
ethnique.
L'Intifada n'a pas commencé pour revenir à la situation de septembre 2000. Ce n'est pas une
bataille pour des négociations. C'est une bataille pour les droits nationaux, une lutte de
libération nationale. Lutte pour la liberté, contre l'apartheid, de pouvoir entre la 4ème
armée du Monde et un peuple beaucoup plus faible.
Certains palestiniens considèrent qu'il faut négocier jusqu'à la mort. La réalité palestinienne,
c'est la démographie, le souvenir, la force de la lutte. Israël quittera les territoires occupés
quand le coût de l'occupation sera supérieur au coût du retrait. Il faut faire en sorte que
ce coût s'élève. La démographie a beaucoup augmenté en Palestine au cours des 20 dernières
années, notamment grâce au travail des ONG qui ont fait baisser le taux de mortalité
infantile 120 à 20/1000. Il faut isoler Israël tant qu'il y aura l'Occupation. Faire monter
le prix, briser la stratégie de Sharon.
La paix doit être basée sur l'égalité à 100%. Il faut une souveraineté complète, un état
complètement indépendant.
3 préalables avant des accords : des élections et l'établissement d'une démocratie, la
présence internationale sur le terrain pour rééquilibrer les forces, des négociations basées
sur l'égalité complète entre les deux parties.
Il faut construire un mouvement international solide pour soutenir le peuple palestinien et
la dignité morale de ce peuple.
Il faut deux Etats car pour l'instant trop d'inégalités entre les deux peuples. Ensuite on
verra.
Youssef BOUSMAH, français, Campagne Civile Internationale de Protection du Peuple
Palestinien
Dans le cadre des missions civiles, cest en Palestine quon peut appréhender
le mieux la forte cohésion européenne vis-à-vis du soutien aux Palestiniens. La France a
eu un rôle fondamental lors de la création dIsraël, sur le plan politico-juridique,
mais aussi sur le plan idéologique. Nous vivons aujourdhui sur un substrat colonial
et la question coloniale est fondamentale dans le soutien accordé par la France à la création
de lEtat dIsraël (cf. soutiens actifs de certains intellectuels, comme Sartre ou
Camus). Au même moment, la question arabe était traitée avec mépris et na jamais été
résolue. Les Palestiniens nont commencé à être remarqués et appréciés que lorsquils
ont fait ce que nous considérions comme un pas en avant en renonçant à une partie de leur
patrie, il a fallu quune partie du peuple palestinien fuit pour quil devienne
visible et acceptable.
Le conflit israélo-palestinien est un conflit colonial : dans les années 40-50,
il fallait casser la résistance arabe en Palestine pour mieux dominer les arabes du Maghreb.
On ne peut pas ignorer cette réalité, on ne peut pas nier la non-existence de la Palestine
dans les manuels scolaires et la manipulation idéologique actuelle qui renvoie toujours ce
conflit à la religion, à lIslam, est inacceptable.
Jusquà présent, le soutien au peuple palestinien na été que très peu
communautaire, mais au contraire multiple et varié. Cest ce qui dérange Israël
et certains juifs, qui veulent à tout prix que cela le devienne, sur le plan national
et international. Ceci dit, les Palestiniens ne sont pas que des victimes : leur
lutte est bien plus forte quon peut le penser. Cette lutte a une dimension universelle
et soulève des questions fondamentales, relatives notamment aux Droits de lHomme.
Nahla CHAHAL, libanaise, Campagne Civile Internationale de Protection du Peuple
Palestinien, France
Elle établit un rapide historique, met en avant que les incursions colonialistes
en Palestine ont court depuis 1948 et que Sharon ne fait que terminer le travail commencé
depuis 1948. Le mur quIsraël construit aujourdhui nest pas seulement
une entrave à la vie des Palestiniens, il est avant tout un outil colonialiste, il est mobile,
il coupe les Palestiniens les uns des autres ; ceux-ci deviennent une « population
en trop » quon étrangle et quon pousse au départ.
Le 21 octobre dernier, vote dune résolution par le Parlement Européen pour
lenvoi dune force de protection en Palestine. En avril 2002, il avait voté
la suspension des accords dassociation Union Européenne - Israël. Ces démarches
constituent déjà un pas énorme, qui suppose que les députés européens aient dépassé
les préoccupations politico-nationnalistes personnelles.
En France, sont déjà parties 75 missions, soit 1.300 citoyens. Il faut continuer.
Internationalisation à tous les niveaux, pas seulement à la base. La question palestinienne
doit être portée par tous au niveau international, citoyens, ministres.
Ruth ELBAZ, israélienne, ICAHD, association israélienne qui travaille à la reconstruction
des maisons palestiniennes.
« Back to the greenline and return to ourselves » (en arrière jusquà
la ligne verte et de retour à nous-mêmes »).
Jeff HALPER, israélien, fondateur de lICAHD, association israélienne qui
travaille à la reconstruction des maisons palestiniennes.
« Si une solution intervient, elle viendra de vous et de nous, pas des gouvernements.
On entend sans arrêt : « Les deux côtés devront faire des concessions, les deux
côtés ceci, les deux côtés cela
». Mais ne vous y trompez pas : du point de
vue israélien, il ny a quun seul côté, celui des juifs. Du point de vue israélien,
il ny a pas de conflit, ce qui permet de nier la résistance palestinienne. Il y a une
asymétrie de base, dans laquelle les Palestiniens sont des objets. A Oslo, il ny a pas
eu de négociations. Israël a refusé le droit à l'autodétermination du peuple palestinien.
Les Israéliens se voient comme des victimes, bien que ce soit la 4ème armée du Monde et
possède l'arme nucléaire, ce qui leur enlève toute responsabilité. Autorisation sans limite
de l'utilisation de la force. Si vous conjuguez le fait dêtre victime avec celui d
avoir la 4ème armée du monde, alors vous comprenez la férocité avec laquelle la 2ème Intifada
a été combattue. Le gouvernement israélien n'accepte rien tant que les Palestiniens n'auront
pas admis que les Israéliens ont tous les droits sur cette terre.
Antisémitisme, victimologie cynique. Israël a inventé une nouvelle forme d'antisémitisme.
Toute critique d'Israël est de l'antisémitisme.
LEtat dIsraël ne veut pas la paix, il veut quon lui fiche la paix.
La société civile israélienne ne veut pas la paix. Il na aucun désir de sinsérer
au Moyen-Orient, mais à lEurope. Se voit comme le Singapour du Proche Orient. La société
civile veut le Mur (à 70%), pas l'Occupation.
Une paix juste narrivera pas dIsraël, mais de lopinion internationale.
Notre conflit est signifiant pour le monde entier. Si l'occupation qui a lieu en pleine
lumière en Israël gagne, c'est un pas en arrière pour le Monde entier.
La société civile palestinienne en Israël a été complètement mise sur la touche. Ne pas parler
de la gauche en Israël au sens où on lentend en Europe. Parlons plutôt de l'extrême
gauche, ceux qui envisagent une vision alternative au sionisme. Même dans ces groupes,
certains sont sionistes.
Si loccupation sarrêtait demain, les problèmes palestiniens deau, des
réfugiés, de la sécurité ne sarrêteraient pas aussitôt. Cest un problème global
du Moyen-Orient. La solution doit être régionale. Les Palestiniens devraient aider les
Israéliens de l'extrême gauche à avoir des contacts dans les autres pays de la région pour
faire bouger les choses.
Au niveau international, il faut élever le niveau de notre action. Il faut recadrer le combat.
Ces dernières années, Israël a très bien réussi à recadrer le combat sur le terrorisme,
la sécurité, la victimisation. Il faut parler de colonisation pour montrer que les actions
du gouvernement israélien ne sont pas une réaction, mais une politique active de nettoyage
du pays selon l'idéologie sioniste d'un seul pays de la Méditerranée au Jourdain.
Le problème des réfugiés : les Palestiniens sont le seul peuple au Monde qui n'a pas encore
reçu son pays de la part des colonisateurs.
Yehudith HAREL, israélienne (ex. militante dans lassociation pacifiste Gush Shalom)
Depuis le début de la deuxième Intifada, les Palestiniens sont victimes dune
terrible brutalité de la part de larmée israélienne : plus de 3000 personnes tuées,
environ 40000 blessés. En tant que juive israélienne, a été « désionnisée » car
a honte de ce qui est fait aux Palestiniens au nom des Juifs. Labandon de l
Holocauste ne justifie pas labandon des victimes en Palestine. Peur que le conflit
sétende au-delà de la région car le gouvernement israélien actuel na aucune
intention de le résoudre. Ce gouvernement a plutôt intérêt à développer le conflit pour
casser les Palestiniens et les faire partir. La société civile israélienne est faible,
la démocratie est en cours daffaiblissement. Pas de pouvoir pour influencer les
partis politiques en cours de fascisation. Reconnaissance que les racines du conflit sont
1948, reconnaissance de la Nakba. Reconnaissance du Droit au retour. Il faut un seul état.
Meyer MARGALIT, israélien dorigine sud-américaine, ICHAD, association
israélienne qui travaille à la reconstruction des maisons palestiniennes.
Je me présente devant vous comme un israélien, et jai tellement honte.
Je croyais dans les dires des prophètes, mais je dois reconnaître que les 30 dernières
années ont été terribles. Nationalisme fort, oppression, peur. Il faut comprendre ça,
ce sentiment de peur. Je suis ici avec ma femme, qui a lutté en Argentine. On se disait,
hier, dans les rues de Paris : « Quel plaisir de se promener dans une ville
sans avoir peur ». La peur nous empêche de regarder au loin.
Moi, je suis prêt à rendre les territoires dès demain matin, avec ou sans paix.
Je ne veux pas être le conquistador de mes amis palestiniens.
Une grande partie de la population israélienne comprend que quelque chose ne fonctionne pas.
Un grand front pacifiste est prêt à rendre les territoires. Et puis arrive un attentat,
et la Droite vient nous dire : « Vous les voyez, vos amis palestiniens ? ».
En finir avec loccupation et avec le terrorisme en même temps.
Si le mur a été construit, il pourra être détruit.
Paul NICHOLSON, Coordination européenne Via Campesina
Il pointe la dimension internationale et la reconnaissance à un niveau global de la
lutte du peuple palestinien depuis 3 ans, lutte qui est devenue partie intégrante du
mouvement altermondialiste. Cest un facteur despoir, avec une influence
réelle sur le mouvement social global.
A Bilbao en Mai 2003, réflexions communes entre mouvements sociaux dAmérique
Latine, dEurope, de Palestine et dIsraël. Cest à la suite de cette
rencontre que la question Palestinienne a été mise à lordre du jour du FSE et du FSM.
5 actions prioritaires ont été définies au cours de cette réunion :
- constituer un tribunal de guerre pour juger les crimes israéliens,
- création dun centre dobservation de loccupation des territoires
palestiniens,
- campagne dadoption des prisonniers palestiniens,
- suspension des accords dassociation,
- promotion des actes de solidarité pour de meilleures conditions de vie des Palestiniens.
Importance de réfléchir aux méthodes daction de manière à ce que la question
palestinienne ne disparaisse pas dans les revendications de laltermondialisme.
Sharif OMAR, palestinien, PENGON
Je suis agriculteur, je viens du village de Jayyous, à quelques kilomètres de Qalqilya.
La clôture passe entre le village et nos terres. Les soldats nouvrent la clôture que
quelques minutes chaque jour, et encore, pas tous les jours. On ne sait jamais si on pourra
aller travailler ou non. Pourtant, nous avons beaucoup de travail, et beaucoup darbres
fruitiers magnifiques. Nous faisons pousser tous les fruits dont vous pouvez rêver.
Mais quand on récolte, on ne peut sortir les fruits.
Moi jai 5 enfants et 15 petits enfants. Quest-ce qui va se passer si je ne peux
plus aller moccuper de mes arbres ?
Je viens de faire construire une maison, mais à cause du mur je ne peux y vivre. Jai
été obligé de construire une cabane au milieu des vergers, parce que maintenant, les
soldats ne nous laissent plus revenir au village le soir, alors quils nous ont
laissé passer le matin pour aller travailler. Tout est fait pour nous faire partir.
Mais nous ne partirons pas. Maintenant, je dors le soir dans ma cabane et la journée,
je peux travailler à mes arbres. Mais je ne vois plus beaucoup ma famille.
Il ne faut pas de barrière, cela ne sert à rien.
Au sujet des attentats-suicides, laissez-moi vous dire une chose : si je suis sur
une terrasse et qu'un ennemi veut me faire tomber, je vais tout faire pour m'accrocher
à lui et quau moins nous tombions tous les deux.
Abdel RHAMAN TAMIMI, palestinien, PENGON (Ongs palestiniennes environnementales)
et Palestinian Hydrologic Group
Il nexiste aucune différence entre la politique du Likhoud et celle des
travaillistes pour ce qui concerne le mur et les colonies. Autant de différence quentre
le Coca-Cola et le Pepsi-cola. Le mur, cest la dernière partie de la politique de
colonisation. Il est fait pour détruire le passé et le futur.
Ce qui se passe actuellement nest que la poursuite des plans officiels de contrôle
de leau en Cisjordanie élaborés dans les années 30.
Nous sommes confrontés et victimes de 3 processus : celui daccumulation,
processus continu (des politiques successives du Likoud et des travaillistes allant toutes dans
le même sens) ; celui dintégration (mêmes efforts, mêmes mentalités pour intégrer
le mur et les colonies) ; celui de contrôle de leau (leau ne sera bientôt
plus pour nous ni disponible, ni accessible). Les infrastructures construites aujourd'hui
sont établies selon un plan qui va jusqu'en 2050. Toutes las actions sont planifiées, il
n'y a pas d'action isolée
En 1991, le Ministère de lAgriculture israélien a publié un article qui indiquait
comment semparer de leau. La carte est la même que celle de limplantation
du mur. La politique pour l'avenir est le contrôle de toute l'aquafère de l'Ouest de la
Cisjordanie, afin que les Palestiniens deviennent seulement des clients.
Il ny aura bientôt plus dagriculture possible dans le nord de la Cisjordanie.
Les Palestiniens en seront réduits à travailler dans les usines israéliennes. Le Mur va
vider les régions du Nord et créer une politique de faits accomplis. Lors des futures
négociations, il sera dit que ces régions sont vides.
Notre pays ne sera constitué que de grands blocs coupés les uns des autres. Il est impossible
de créer un Etat viable dans ces conditions. Le mur tue la géographie, lavenir du
peuple palestinien.
Omeyya SEDDIK, français, Mouvement de lImmigration et des Banlieues
On a le droit de penser que laisser 2 Etats côte à côte, cest perpétuer le danger,
faire monter la violence, et que ça maintient la notion dapartheid « ethnique ».
Michèle SIBONY, française, Union Juive Française pour la Paix
Précision : UJFP signifie « Union juive française pour la paix », et
non pas « Union des juifs français pour la paix », volonté davoir une
opinion représentative non communautariste.
LUJFP a beaucoup grossi ces dernières années de par la volonté de plus en plus
de juifs de se démarquer du discours communautaire, qui sest voulu représentatif et
dominant dès le début de la 2ème Intifada. Elle cite R. Cukierman, Président du CRIF,
qui a « embrigadé les juifs sans leur demander leur avis ». En face, côté
musulman, les représentants ont toujours été plus réservés et modérés.
La communauté juive française représente environ 600.000 personnes, cest la
2ème après New-York et elle constitue un enjeu que Sharon ne peut pas négliger. Eyal Sivan,
cinéaste israélien, a dit que, pour Sharon, « il était fondamental que les juifs et
les arabes narrivent pas à se mettre daccord en France, Etat laïc et républicain,
afin que lopinion publique ait la démonstration quil en est ainsi partout
ailleurs ». Mais la réalité du terrain est tout autre : au FSE, 18 associations
juives de 9 pays différents luttent pour la reconnaissance des droits des Palestiniens.
En France, lUJFP tente, avec certaines organisations comme l
ATMF (association des travailleurs maghrébins en France) davoir un discours commun.
Le conflit israélo-palestinien est politique et réclame des solutions politiques,
par le biais du droit international. Les différentes missions civiles ont pu témoigner
que les Palestiniens ne sont absolument pas dans le clivage juifs / arabes ;
les Palestiniens veulent que les Israéliens se retirent, cest différent.
Leïla SHAHID (depuis la salle), palestinienne, représentante de lAutorité Palestinienne
en France
Il est primordial de penser globalement la Paix. Rafah détruite à 50%, Qalqilya complètement
isolé : profondément choquée que le représentant de lUE, Marc Hotte est
boycotté par le gouvernement israélien pour le punir davoir rencontré Yasser Arafat.
Pendant ce temps, lUE a prolongé les accords dassociation avec Israël,
Tous les avantages sont donnés à Israël qui traite le représentant européen comme
du « caca » ! On na pas encore vu une seule protestation dans les médias
européens.
Les européens doivent instituer le règne du Droit.
Tamir SOREK, israélien, association pacifiste Yesh Gvul (« Il y a des limites »)
Raji SOURANI, palestinien, directeur du Palestinian Center for Human Rights
Le peuple palestinien a besoin :
de lapplication du droit international,
de la fin de loccupation israélienne de ses territoires,
du droit à lautodétermination.
La 4ème Convention de Genève, qui a été élaborée pour la protection des populations
civiles en situation de guerre, nest toujours pas appliquée au peuple palestinien.
Alors que lensemble des nations considère Gaza, la Cisjordanie et Jérusalem Est
comme des territoires occupés, lEtat dIsraël les considère comme « territoires
disputés », ce qui lui permet de sortir du cadre de la 4ème Convention de Genève.
Au titre de cette Convention :les colonies sont des crimes de guerre,
ainsi que le transfert de population,lannexion des territoires,les assassinats ciblés,
etc.
Depuis 1999, il ny a eu aucune réunion significative des pays signataires de
la 4ème Convention de Genève.
Raji Sourani souligne le rôle formidable de la population européenne pour protéger
les populations civiles.
Au sujet de linitiative de Genève : Raji Sourani insiste sur le fait que la
Suisse a pour linstant échoué dans son rôle de garant des conventions de Genève.
Les Palestiniens demandent : « la règle de la loi, pas la règle de la
jungle ». Pas besoin quun accord entre intellectuels justifie les crimes de
guerre perpétrés par Israël. « Laccord de Genève légitimise les crimes de guerre
commis par Israël ».
Dominique VIDAL, français, Le Monde Diplomatique
Il existe un fossé entre une opinion publique européenne largement en faveur des
palestiniens et une réelle difficulté à mobiliser les gens au sein des mouvements de
solidarité. Le récent sondage, selon lequel 59% des européens pensent quIsraël est
le pays qui menace le plus la paix sur le plan international, montre bien que les citoyens
européens ont des opinions très tranchées.
Depuis deux ans, malgré une manipulation marquée de certains médias et intellectuels,
lopinion française se forge ; il y a de plus en plus de gens qui soutiennent
les Palestiniens, alors que le soutien aux israéliens stagne. Alors, pourquoi ce fossé cité
au début ?
tout dabord, la plupart des gens sen tiennent plus, par habitude, à une simple
manifestation de solidarité stricto sensu,
plus fort encore, il existe un problème dorientation politique : si nous voulons
un véritable mouvement de masse, il faut rompre avec la tradition française qui cherche à
tout prix les clivages et qui évite les rassemblements (le « rétrécissement »
nest-il pas ainsi un moyen de sassurer de la « pérennité »
révolutionnaire de tous nos adhérents ?).
enfin, on a fait volontairement la jonction entre le mouvement altermondialiste et les jeunes
issus de limmigration mais, en réalité, les organisations ont du mal à travailler avec
les jeunes des cités sur un pied dégalité ; chez certains militants très à gauche
subsiste encore un esprit néo-colonialiste.
Lanalyse de la stratégie sioniste est indispensable pour comprendre le conflit
israélo-palestinien ; un constat : la question du sionisme, sur le plan politique,
est obsolète. LEtat juif existe. Le problème, cest la politique de répression
menée par le gouvernement israélien en Palestine. Face à cela, la solution est que les
organisations se rassemblent sur la base du droit international, quelles que soient leurs
positions religieuses ou idéologiques.
Il sagit également de résister au terrorisme intellectuel qui sévit depuis deux
ans sur la question de lantisémitisme : il ne faut laisser subsister aucune
ambiguïté par rapport à cela ; il ne faut pas non plus sous-estimer les violences
anti-juives, même si les violences anti-arabes ne sont pas recensées de manière aussi
systématiques. Bref, ne plus tolérer aucune forme dantisémitisme ou dislamophobie.
Le plan de Genève : le Monde Diplomatique sest battu contre la légende
Barak à Camp David et a donné des preuves que le 1er Ministre israélien pouvait aller
plus loin ; les accords de Taba ont constitué un pas en avant ; le plan de Genève,
de la même manière, peut être considéré comme un pas en avant, même si certains points ne
sont pas satisfaisants au regard du droit international :
sur la question des réfugiés : seul lEtat Palestinien est admis à accueillir
les réfugiés sans conditions,
le plan de Genève entérine la colonisation juive à Jérusalem et autour.
Il revient avant tout aux palestiniens de décider sils rejetteront, ou non, le plan
de Genève, cest dabord leur affaire.
Pour resituer le plan de Genève dans le contexte : en 3 ans, Sharon a réoccupé la
Cisjordanie, plus de 3.000 palestiniens ont été tués. La priorité absolue aujourdhui,
cest darrêter cette hécatombe et den revenir au terrain de la négociation.
Le plan de Genève tombe à pic : Israël est en pleine faillite sécuritaire, économique
et sociale, ainsi que dans une impasse diplomatique (voir le vote massif lors de lAG
de lONU contre le mur). Le plan de Genève casse la propagande menée par Barak puis
Sharon et montre que la paix est possible, quil existe des partenaires valables
parmi la gauche israélienne et parmi les Palestiniens. Sauf si lautorité palestinienne
rejette le plan de Genève, rien ne peut laisser penser que ce plan ne représente pas un petit
espoir de paix.
Michel WARSCHAWSKI, israélien, fondateur de lAlternative Information Center,
Jerusalem
Le FSE nest pas, contrairement à ce qua dit Dominique Vidal lors d
une précédente intervention, une grand messe, mais bien une immense réunion de travail
qui a bien évolué depuis Florence et Genève. La presse soulève souvent cette question :
« Pourquoi les altermondialistes sintéressent-ils autant à la problématique
palestinienne ? » Cette question nest évidemment pas neutre, et sans doute
limite antisémite ! Une des réponses, cest peut-être que la Palestine est le seul
pays dont lAmbassadrice vient aux forums comme une simple militante, assister aux
débats et échanger des idées (ndr : Leïla Shahid a participé à plusieurs des séminaires
sur la Palestine, dans le public).
Lapartheid est une nouvelle réalité de ce monde. On crée des murs partout. Shenguen,
cest des murs, entre le Nord civilisé et le Sud barbare. Des murs entre les quarties
riches et les quartiers pauvres. Il faut contre-attaquer, et créer un front « Blanc,
beur, noir ».
Lourde responsabilité des soi-disant intellectuels qui ont réveillé lantisémitisme.
Dominique (de retour de mission en Cisjordanie)
Il faut personnaliser chaque victime. Ca ne peut pas être une addition. Chaque cas est différent.
Il faut rapporter des faits précis. Impressionnée par la résistance pacifique active.
Vouloir maintenir une cohésion sociale malgré la situation, tout en envisageant lavenir.
Les Palestiniens supplient lEurope de faire quelque chose dune seule voix.
Conclusions :
- Nicholson a dit que la mobilisation de milliers de citoyens européens est réelle, mais
quune coordination de ces mobilisations doit être mise en place durgence.
- De jeunes palestiniens dans la salle réclament la mise en uvre de choses pratiques,
car on peut faire 100 conférences de la sorte, sans que rien ne bouge. En ce qui concerne la
protection internationale, elle va seulement protéger les Palestiniens de loppression,
mais pas forcément faire respecter leurs droits.
- Une militante suisse dit que lInitiative de Genève est un facteur de démobilisation.
Il faut que les Internationaux aident les Suisses à protester contre ce show médiatique à la
signature de ce texte. Collaboration militaire du gouvernement suisse, pas de respect des
Conventions de Genève, alors quils sont garants des traités.
- Organiser une campagne pour rompre lisolement de Gaza.
Une question de la salle :
Et les colons, quest-ce qui se passera pour eux le jour où les Israéliens devront
quitter les Territoires ?
Remarque de lAFPS Alpes Hautes-Provence au sujet de lintervention de
Dominique Vidal : son discours est peut-être un peu trop « parisien ».
En province, les gens ont moins de mal à se mobiliser ; outre des actions très concrètes
et multiples, les organisations ont des débats didées au moins aussi profonds que ceux
qui ont cours dans la capitale !
IMAGES DU FSE